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Ouest France : cette jeune capitaine fait revivre le patrimoine fluvial de la Loire


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Émilie Pocquereau et son mari Vincent ont racheté ou fait construire 6 bateaux typiques du patrimoine ligérien. Ils proposent des balades, des nuits ou un bar flottant. Un business, oui , mais aussi une façon de préserver une culture encore discrète.



Les deux ponts qui surplombent l'île d'Offard, face au château de Saumur (Maine-et-Loire) offrent au visiteur occasionnel un spectacle déroutant. L'imagination gonflait les eaux de la Loire sous les arches de pierre ; ce n'est qu'un cours d'eau étroit, entouré de ce qui s'apparente davantage à des prairies. Le long fleuve, le plus grand entièrement en France (1006 km), est bien tranquille.

" On peut encore naviguer mais c'est très compliqué. On a perdu 28 hélices cet été à force de racler le sol", admet d'emblée Emilie Pocquereau. La Saumuroise de 37 ans est à la tête, avec son mari Vincent, de Loire Évasion. Six ans d'existence, 15 salariés, et surtout 6 bateaux. A chacun sa fonction.


Reconversion depuis le vin

Le long de la rive herbeuse de l'île, est amarré Mme Amandine, un imposant bateau plat de 20 mètres, qui sert de restaurant et bar. A ses côtés, on retrouve la P'tite Lois, un bateau-taxi pour emmener, moyennant 2€, les curieux en centre-ville. La Mademoiselle est là aussi, pour des balades sur la Loire, une coupe de vin ou de crémant en main. Le Balbuzard et le Martin-Pêcheur servent, eux, d'écolodge pour les touristes.


L'entrepreneuse savoure le chemin parcouru. "Aucune banque n'a voulu nous suivre pour notre projet. C'est un ami qui nous a fait un prêt pour le premier bateau, la Nonchalante. Aujourd'hui, je suis pleinement épanouie", lance-t-elle souriante, le regard bleu déterminé. Une reconversion réussie pour celle qui a débuté, comme nombre de natifs du coin, dans le vin, côté ressources humaines.





Impossible de filer une quelconque métaphore avec la couleur de l'eau qui l'entoure, la Loire reflétant le ciel grisâtre de cette fin d'été. Qu'importe, Émilie Pocquereau l'aime ce fleuve. "Dès que je n'y suis pas, ça me manque". Devenir entrepreneuse était l'un de ses rêves, faire revivre une partie du riche patrimoine fluvial, un autre.


La Loire, elle baigne dedans depuis toute petite "Tout le monde a quelqu'un dans sa famille qui était pêcheur", résume-t-elle. Son histoire à elle est pourtant bien différente. "Ma grand-mère était terrorisée par la Loire. Elle me racontait qu'une classe entière s'était noyée ici*". L'interdit se transforme pourtant, pour la jeune ligérienne, en attirance.


Gueux sur terre, seigneurs sur l'eau

Elle convoque un passé qu'elle dit presque oublié, fait de "personnes populaires. Des mariniers, des gens du voyage, des bagnards. Gueux sur terre, seigneurs sur l'eau, comme on disait".

La Loire, à une époque pas si lointaine, semblait incroyablement vivante, les anciens parlaient "d'un bateau passant sous les fenêtres toutes les 10 minutes", croit-elle se rappeler, alors que le seul navire à brave le fleuve depuis le début de l'entretien est un modeste kayak rouge.


Avec son mari, elle fait reconstruire ce patrimoine oublié : des "chalandes ou plates, l'équivalent des gabares du sud", mais aussi les "toues cabanées. Les pêcheurs de saumon vivaient à l'arrière du bateau dans la partie couverte".

Si elle regrette l'invasion des "bateaux en plastique", Emilie Pocquereau accorde quelques concessions à la modernité : ici des douches dans les bateaux-gîtes, là une coque en fer pour Mademoiselle, plus résistante que celle traditionnelle en bois.


Rare batelière

Les bateaux, équipés de voiles, sont aussi motorisés. Mais certaines techniques survivent. Emilie Pocquereau se saisit d'une solide perche en bois terminée d'un éperon ferré. La bourde permet de se dégager des bords du fleuve, pour se remettre dans le flot et jouer des courant et contre-courants, un art que manie Emilie Pocquereau, l'une des rares batelières "dans un monde d'hommes".

C'est donc en capitaine, qu'elle participera au festival de Loire, à Orléans, du 20 au 24 septembre 2023. Un rendez-vous incontournable pour retrouver des amis, des pairs, partager les anecdotes et conseils. Pour faire revivre ce monde maritime fier mais discret.


*Peut-être le drame de Juigné-sur-Loire, à 35 kilomètres de là. Le 18 juillet 1969, 19 enfants d'un centre aéré s'y étaient noyés.


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